Une journée passée dans la si belle région de Puisaye en Bourgogne m’a permis de découvrir mille merveilles que je vous dévoilerai petit à petit: je vous parle aujourd’hui des charpentes du chantier médiéval de Guédelon et du ravissant château de Saint Fargeau. A Guédelon, la tradition médiévale reconstituée au XXIe siècle; à Saint Fargeau une œuvre classique et spectaculaire. Une étonnante promenade au cœur du bois.

L’aventure Guédelon:

La construction du château fort que l’on découvre au  milieu d’une forêt de chênes a commencé en 1997. C’est un pari formidable que s’est lancé Michel Guyot (actuel propriétaire du proche château de Saint Fargeau) en commençant l’édification d’un château selon les méthodes médiévales du XIIIe siècle, avec les matériaux trouvés sur place.  Un projet d’envergure scientifique qualifié d’archéologie expérimentale. Cette magnifique aventure doit s’achever en 2025… Cela nous laissera le temps de venir admirer l’avancement des travaux! Guédelon respecte les règles architecturales de Philippe-Auguste (architecture philipienne). La forêt de Guédelon fournit le bois de chêne nécessaire aux charpentes, aux passerelles et aux chemins de ronde.

Ma première visite à Guédelon remonte à huit années: les fondations étaient alors tout juste sorties de terre, le château encore à l’état d’ébauche. Ma visite de cette fin de mois de juin 2011 me laisse particulièrement émerveillée par la charpente du logis seigneurial. Terminée à l’automne dernier, avant l’habituelle période « d’hibernation » du chantier, la charpente qui couvre la grande salle du logis seigneurial, au centre des fortifications, est particulièrement majestueuse et élégante. La visite permet de l’admirer depuis l’étage (grande salle dotée d’une imposante cheminée) mais aussi depuis le rez-de-chaussée, au travers des poutres destinées à supporter le sol de la grande salle: les planches qui porteront le dallage ne sont pas encore posées, ce qui accentue l’effet époustouflant de cette charpente en forme d’ogive. Le bois de chêne, directement coupé aux alentours de la clairière et débité sur place nous dévoile le spectacle étonnant d’une charpente « à l’ancienne » (« sans clous ni vis », comme dirait une célèbre publicité de colle qui semble ignorer la beauté de l’assemblage chevillé!) mais pas encore marqué par la patine du temps. Les charpentiers de Guédelon sont de vrais artistes du bois et la charpente du logis est à admirer comme une œuvre de grand art (et en plus, contrairement aux galeries des musées parisiens, le visiteur ici ne manque pas de recul!).

La renaissance du château de St Fargeau:

A quelques kilomètres du chantier médiéval, un autre château, terminé celui-ci mais ayant subi au cours des siècles de graves incendies et l’abandon aux dommages du temps, révèle aussi un trésor caché sous les toits. Saint Fargeau est le château où l’écrivain Jean d’Ormesson, héritier de plusieurs siècles d’histoire (et de décrépitude du château), fit tourner la version cinématographique de son roman Au bonheur de Dieu. Outre l’intérêt architectural et historique, on se laisse émouvoir par le charme du château, immense bâtisse  usée par les ans mais où la grandeur passée est palpable. La Grande Mademoiselle, cousine de Louis XIV, y est « exilée » en 1652 (pour avoir participé à la Fronde) et, en femme de tête, décide de mettre à profit cette disgrâce pour transformer l’ancien château fortifié en agréable demeure aux larges ouvertures et à la silhouette élégante. Les différents bâtiments s’organisent autour de la grande cour centrale selon un plan hexogonal.

La visite des charpentes permet de faire sous les toits tout le tour de la cour! Un spectacle fascinant. L’odeur du bois se mêle à celle de la poussière, la chaleur est étouffante (il faisait la semaine dernière 35° à l’ombre et au moins 50° sous les charpentes!), mais cette longue promenade sous les toits d’ardoise ne déçoit pas. On y passe de grandes salles où la charpente semble carcasse d’un immense vaisseau à des tours où les poutres cintrées, serrées les unes aux autres pour former une grande coupole, font penser au corps d’une baleine échouée. D’autres passages nous prennent dans les poutres comme un insecte dans une gigantesque toile d’araignée. Le bois est partout: on se prend à rêver et on s’imagine tantôt dans une majestueuse futaie, tantôt dans une jungle hostile où il faut se frayer un passage… La visite est époustouflante, instructive (on y découvre le nom des différents éléments composant la charpente), ludique aussi car la visite réserve quelques surprises (pas toujours très agréables mais très appréciés des amateurs de sueurs froides!); elle est surtout l’occasion de faire « le tour du propriétaire »: de petits panneaux indiquent régulièrement à quel endroit du château on se trouve, afin de mieux apprécier le gigantisme de l’édifice. Ne ratez pas ce voyage à travers 4 siècles d’histoire des charpentes!

Chantier médiéval de Guédelon  Pour la visite, un petit conseil: munissez vous d’un couvre-chef en cas de beau temps car le soleil tape fort dans la clairière, mais en cas de météo pluvieuse n’oubliez pas de vous chausser de bottes: l’humidité transforme vite la poussière du sol ferrugineux en boue orange!

Château de Saint Fargeau En plus de la visite du château (visite en partie libre, en partie guidée), ne vous privez pas d’une promenade dans le parc de 120 hectares! Si vous en avez plein les bottes (cf ci-dessus!) et que vous ne craignez pas trop les secousses du chemin, l’attelage de la malle-poste vous fera découvrir une petite partie du parc et le lac où a lieu le spectacle son et lumière estival.

Pour en savoir plus: Florance Charpente Couverture propose aux passionnés de charpentes un très bel exposé avec un lexique détaillé de tout le vocabulaire du couvreur.

Entre Guédelon et Saint Fargeau, une halte incontournable dans cette ravissante église Saint Pierre de Moutiers-en-Puisaye… Je ne vous en dis pas plus…Un trésor est à l’intérieur.